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  • COMMENT EXPLIQUER L’INSIGNIFIANCE DE LA MOBILISATION ANTI-GUERRE EN FRANCE ?

    COMMENT EXPLIQUER L’INSIGNIFIANCE DE LA MOBILISATION ANTI-GUERRE EN FRANCE ?



    Des évènements graves se déroulent actuellement au centre de l’Europe. Une guerre meurtrière et destructrice, une surenchère guerrière dangereuse qui pourrait dégénérer en conflit mondial généralisée voire en guerre nucléaire. Or, préoccupée d’emplois, de chômage, de précarité, de retraites, de salaires et d’inflation, ce qui est tout à fait légitime par ailleurs, l’opinion française semble rester impavide face au danger d’apocalypse qui menace l’humanité.

    Il y a eu, des mobilisations significatives et même parfois importantes, dans de nombreux pays européens, contre la guerre en Ukraine, contre l’escalade guerrière, contre la fourniture d’armements, pour une paix négociée. Or la France « Pays des droits de l’Homme », patrie de Jean-Jaurès, fait en la circonstance figure de mauvais élève. Pourquoi ?

    Voilà un questionnement qui n’a pas échappé à Roland Nivet, secrétaire national et porte-parole du mouvement de la paix. Un questionnement dont il s’est épanché à plusieurs reprises dans ses interventions ces 15, 16 et 17 septembre à la « Fête de l’Humanité » lors de plusieurs meetings consacrés à la guerre en Ukraine et à l’exigence de paix.

    Une chose l’interpelle. Nous étions des millions dit-il, mobilisés contre la guerre en Irak, alors que la guerre actuelle en Ukraine ne mobilise que peu de monde chez nous. D’où cela vient-il ?

    Que Monsieur Roland Nivet, j’oserai dire « Camarade », et vous autres amis lecteurs, veuillent excuser ce qui pourrait apparaitre fort immodeste de ma part, mais je possède la réponse à ce questionnement.

    Je vous la livre :


    Déjà, lors de la « première guerre » que l’on appela du golfe, en 1991, malgré le contexte : invasion du Koweït par l’Irak et l’exécration entretenue du personnage de Saddam Hussein, « Ogre et dictateur », il était apparu à l’Opinion que ces circonstances ne justifiaient en rien une agression impérialiste motivée en vérité par la question du contrôle des sources d’approvisionnement pétrolier et de motif géostratégiques consistant à réduire toute puissance régionale afin d’assurer la prééminence d’Israël. Les choses étaient claires et le furent d’avantages encore en 2003 quand Georges « dobeldiou » Busch, rêvant d’achever l’œuvre de son père entrepris sa croisade civilisationnelle contre ce Saladin contemporain qu’était devenu Saddam Hussein, bien malgré lui. Les choses étaient claires dis-je, il s’agissait d’une agression impérialiste, néocoloniale, contre un état subalterne, et l’opinion anti impérialiste et anticolonialiste y trouva ainsi toutes les bonnes raisons de s’émouvoir et de se mobiliser.

    Mais sur la question de la guerre en Ukraine les cartes ont été brouillées et le message faussé.


    1) En abandonnant le soviétisme la Russie est devenue un pays capitaliste, un impérialisme comme les autres. Il est aisé dès lors de renvoyer dos à dos impérialismes américain et Russe. Pas question de choisir entre l’un et l’autre. Voilà donc un bon biais pour valider la propagande occidentale de diabolisation de Poutine et du régime politique russe. Voilà à point nommé un artifice facile pour s’absoudre de l’obligation de combattre son propre impérialisme. Alors certes on en fait la critique tout de même, pour donner le change. Mais qu’importe, celle-ci est inopérante. Dès lors que l’adversaire est réputé coupable et tout aussi pervers. On a, à ce stade, sans s’en apercevoir peut-être, adopté le point de vue de son propre impérialisme.

    2) La datation du déclenchement du conflit au 24 février 2022, et la désignation qui en résulte de la Russie comme « agresseur, au sens du droit international, a pour effet d’occulter les évènements antérieurs sciemment perpétrés par les occidentaux pour conduire à la guerre, et qui, par-delà les discours émollients sur la paix et ses blanches colombes en général, valide la rhétorique va-t’en guerre. Ne faut-il pas punir le méchant (impérialiste, dictateur et sanguinaire) ?

    3) La Russie lançant une opération militaire à l’intérieur des frontières de l’Ukraine, le conflit a été d’abord perçu comme le résultat du seul différend russo-ukrainien. Malgré l’implication massive de l’Occident dans cette guerre qui n’aurait pu durer sans cela (soutien financier, logistique et militaire) certains s’obstinent encore, presque deux ans plus tard, à ne vouloir voir qu’une guerre russo-ukrainienne, là où se joue en vérité, sur le sol ukrainien et au mépris du peuple ukrainien, une confrontation russo-américaine.

    En quelque sorte, Si l’on veut établir des parallèles entre les mobilisations populaires contre la guerre d’Irak et celle d’Ukraine, il faut convenir de ceci : Qu’importe la nature du régime russe et la personnalité du Président Poutine, rien ne justifie et ne justifiera jamais les manigances agressives de l’impérialisme américains qui a inscrit à l’ordre du jour de sa politique internationale le démembrement de la Russie et le pillage de ses richesses.

    Durant huit années (2014 à 2022) l’Occident à armé et préparé militairement l’Ukraine pour faire de celle-ci l’instrument de son agression contre la Russie. La meilleure défense dit-on c’est l’attaque. L’Ukraine et ses mentors préparaient une offensive massive sur le Donbass. Poutine n’a pas attendu qu’une pluie de feu s’abatte sur ces territoires et ces populations. Il a prévenu l’attaque en attaquant d’abord. Cela ne change rien à la configuration des choses.

    L’agression vient de l’Occident, des desseins d’hégémonie planétaire de l’Impérialisme Américain.

    C’est pour l’heure celui-ci qu’il convient de stopper. C’est à celui-ci que les peuples mobilisés se doivent de faire échec et mat. C’est à celui-ci, à notre propre impérialisme que nous devons infliger une défaite car, la lutte contre la guerre impérialiste commence par la lutte pour la défaite de son propre impérialisme.

    Contraindre l’impérialisme Occidental (Américain) à négocier un accord de paix et de sécurité collective avec la Russie, voilà la défaite qu’il convient de lui imposer.

    Voilà l’objectif, voilà la clarification nécessaire, voilà la base sur laquelle on pourrait escompter construire, en France (et dans le monde) un vaste et puissant mouvement anti-guerre.



    Patrick Seignon. « lavoiedessansvoix.fr ». Lundi 18 septembre 2023. (Publié mardi 19/9/2023)
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