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  • IL FAUT REFONDER LE SYNDICALISME (De lutte, de classe et indépendant)

    IL FAUT REFONDER LE SYNDICALISME

    (De lutte, de classe et indépendant)

    Nous avons écrit et publier (« Les organisateurs de défaites » 11 juillet 2923) un premier article de bilan et d’analyse de la vaste mobilisation populaire du printemps 2023 contre le projet réactionnaire de liquidation des acquis sociaux intitulé « réforme » des retraites.

    Nous avons expliqué dans ce premier article par quelle perversion politique, les directions syndicales confédérales se sont faites les complices du pouvoir macronien et comment sous couvert de manifestation massives et de prétendu blocages (blocages bisounours), elles n’avaient en vérité voulu qu’accompagner le mouvement afin de le canaliser. Leur soucis étant d’éviter un embrasement social incontrôlable.

    Mais il convient aujourd’hui d’éclairer d’une lumière plus crue les dessous de cette trahison historique.

    Chacun se souviens qu’il s’agissait de « réforme des systèmes de retraites ». Or Macron avait renoncé à son projet initial de « retraite par points » qui devait liquider le système « par répartition » fondé sur la solidarité intergénérationnelle Or, la revendication du mouvement se focalisa contre le recul de 2 ans de l’âge limite de départ (de 62 à 64 ans). Ce qui contenait déjà une trahison majeure de l’esprit du mouvement contestataire puisque la revendication initiale de celui-ci était le retour à l’âge de départ à 60 ans.

    Mais s’il ne s’était agit vraiment que de la limite d’âge de départ en quoi cette loi aurait-elle mérité le qualificatif de « réforme » ? S’il ne s’était agi que du recul de deux ans de l’âge limite de départ, cela relevait d’un simple « amendement à la réforme précédente de 2010 (Sarkozy/Eric Woerth), et ne méritait en aucun cas le titre prétentieux de « réforme »

    La réponse à cette question, pour ceux à qui elle avait échappée, vient d’arriver ces jours-ci avec les décrets d’application portant liquidation des « régimes spéciaux de retraites ». Des dizaines de milliers de salariés qui bénéficiaient de régimes de retraite particuliers liés à l’histoire ou aux conditions spécifiques de leur profession ou à l’Histoire des luttes sociales, ramenés au régime général d’un trait de crayon ; Des millions d’euros ainsi récupérés par les patrons ou capté par le système financier. Voilà en quoi l’Oukase (ce n’est pas une loi elle n'a pas été voté) Macron/Borne mérite son titre de « Réforme » même si ce n’est qu’une réforme régressive ou "contre-réforme"».

    Or, vous en souviennes, focalisé sur la seule question du recul de l’âge de départ à la retraite, plus personne ne parlait vraiment, depuis belle lurette, de la liquidation des régimes spéciaux. Ne peut-on pas en déduire que la focalisation sur les 64 ans était déjà une manière de trahison à l’égard des bénéficiaires des régimes spéciaux ? L’intersyndicale aurait-elle voulu exprès focaliser sur les 64 ans afin de faire oublier qu’elle avait déjà vendu les régimes spéciaux ?

    La stratégie de lutte : Unité de l’intersyndicale, manifestation de masse, grèves circonscrites, blocages bisounours, conduisait de manière certaine dans une impasse. Mais ce n’est pas à l’issue d’un combat résolu que l’intersyndicale a été acculée à la défaite. Ça n’est pas du fait de contingences imprévisibles, d’un rapport de force défavorable : gouvernement plus fort ou contestation insuffisante ou insuffisamment déterminée. Ce n’est pas par inadvertance que l’intersyndicale a conduit le mouvement dans le mur qui ferme toujours le fond de l’impasse. C’est la conséquence d’un choix délibéré. Ils n’ont pas trahi par bêtise ou couardise, ils l’ont fait sciemment. Ces directions syndicales là ont agit comme des officines du pouvoir infiltrées dans le mouvement syndical.

    On ne peut pas se limiter à exiger que les directions syndicales se « réforment » elles-mêmes, qu’elles adoptent un cours nouveau, qu’elles fassent la politique qu’elles ne veulent pas faire.
    Le temps est venu des solutions radicales.
    Que doit-il en advenir ?
    Faut-il tourner le dos aux syndicats ?
    Certainement pas. Nous l’avons déjà dit. Ce n’est pas le principe syndical qui est en cause, mais l’intégration des directions syndicales confédérales et de certaines fédérations au système.
    Des syndicalistes intègres doivent-ils se porter à la direction des syndicats pour les changer de l’intérieur ? Certainement pas non plus. Il s’agit d’un système et en l’investissant on a tous les risques de se pervertir soi-même.
    Faut-il créer un nouveau syndicat bien propre et bien intègre. Absolument pas non plus ; Ça ne ferait qu’accroitre la division et d’ailleurs cela a déjà été fait il n’y a pas si longtemps avec la création des SUD, pour un résultat, comme on le voit, peu probant en ce qui concerne l’évolution du syndicalisme en France..
    Non !

    Ce qu’il faut c’est créer, souder, former, une opposition intersyndicale unitaire ; capable d’impulser et d’organiser elle-même la lutte, au moins dans certains secteurs, et au moment opportun d’organiser le débordement des consignes confédérales. Éventuellement de s’emparer alors des directions syndicales fédérales et confédérales ; mais non pas comme des individus isolés se croyant plus malins que la moyenne, mais comme les représentants d’une association, les exécuteurs d’une volonté collective. Un peu comme fit en son temps la VO (vie ouvrière) des origines sous la direction de Pierre Monatte, qui était en vérité la voie du syndicalisme révolutionnaire de classe et indépendant et s’opposa durant la première guerre mondiale à « l’union Sacrée » dans laquelle Léon Jouhaux avait compromis la CGT.

    Voilà ce qui me parait-être la tâche du moment, la mission à laquelle doit s’atteler, à mon sens, le collectif « Ne tournons pas la page ».


    Patrick Seignon. « lavoiedessansvoix.fr ». Vendredi 4 août 2023.
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