• bouton partage

  • JE SUIS UN MOUTON, JE VOTE MACRON !

    JE SUIS UN MOUTON, JE VOTE MACRON !



    Parmi les métiers que j’ai exercés, il y eut un temps celui de camelot, qui s’apparente à celui de « bateleur de foire » et dont la désignation technique exacte est « vendeur démonstrateur ». J’avais je dois le dire, quelques dispositions. Chaque métier a ses « sciences » et ses « trucs » et chacun est riche d’enseignements.

    Pour réaliser des performances, c’est-à-dire « du chiffre » en langage bisness, il y a, dans ce métier, trois grandes difficultés à vaincre. La première est « d’entréper », selon l’argot du métier. Ce qui signifie capter l’attention des chalands et parvenir à fixer une petite foule devant ses tréteaux. La seconde est de garder le peuple ainsi agglutiné tout le temps de la démonstration, voire plusieurs heures durant. La troisième difficulté est de « transformer » l’essai en acte d’achat.

    Il faut pour réaliser cette performance, d’abord certes proposer un article suffisamment porteur, mais aussi beaucoup de technique oratoire, de souffle et d’à-propos. J’étais un artisan ce qui est la règle générale dans ce métier. C’est sur des techniques équivalentes, mais à l’échelle industrielle, si je puis dire, qu’est fondée la campagne électorale d’Emmanuel Macron. Là où le bateleur de foire ne peut compter que sur un ampli un micro et son savoir-faire, lui compte avec l’amplification de cent médias à la solde, de nombreux collaborateurs et complices identifiés ou secrets, un afflux de moyens et d’argent considérable.

    Il a été fabriqué, mis en lumière d’abord au Ministère des finances. Puis, téléguidé, instrumentalisé comme le mouton de panurge, par ses « Mentors » et sponsors il a entrepris alors son opération et a bien entendu, ainsi épaulé, réussi le premier « challenge » celui de « l’entrépage ». Quelques badauds se sont agglutinés à ses basques, et c’est la loi du genre, fondé sur le réflexe grégaire propre aux hommes et aux moutons, d’autres curieux ont été attirés et la foule de ses suiveurs a grossit. Mais s’est une autre loi du genre, pour garder l’attention de la foule, jusqu’au but à atteindre, il faut un article porteur, dans le cas d’espèce un programme attractif et convaincant, et une bonne maitrise des arts oratoires. Un « fabouillage », une parole mal placée, une tournure inappropriée. Et hop, la foule s’évanouie comme elle était venue.

    « L’article », en l’occurrence le programme, du candidat Macron n’est pas des plus convaincant, bricolé de bric et de broc, mal ficelé, et très inquiétant quant au peu de fond qu’il possède vraiment. D’autres, presque tous, l’ont déjà dit avant moi, je ne m’attarderai donc pas sur cet aspect, son programme n’est qu’une version revisitée de celui de François Hollande. Il faut toutefois s’attarder sur trois points concernant directement les salariés et les classes populaires, de nature à les dissuader de ne jamais voter pour cet homme-là : Le traitement du chômage, le régime des retraites et la suppression de 120 000 fonctionnaires.

    1) Le traitement du chômage. Macrons veut supprimer les cotisations patronales et salariales qui constituent le socle du financement des allocations. Ce qui bien entendu, pour ceux qui ne pensent qu’à eux et se foutent du reste du monde peut dans un premier temps paraitre une mesure séduisante. Mais il faut bien les financer tout de même, alors Macron propose de le faire par l’impôt. Ce qui revient à alléger partiellement les charges des entreprises pour en reporter le poids sur les contribuables et comme ce sont les classes moyennes et les salariés qui payent le plus d’impôts, à faire basculer « sur les ménages » les salariés et couche laborieuses une partie du financement du chômage qui incombait aux entreprises. Il s’agit de « fiscalisation du chômage, comme autrefois Rocard inventa la CSG pour « fiscaliser les revenus de la SS. qui échappait ainsi à sa vocation paritaire. Cette mesure consiste en raccourci à faire payer le chômage encore plus par les salariés eux-mêmes, qui en sont pourtant les victimes à plusieurs titres.

    2) Le régime des retraites. Manuel Macron promet « une réforme d’une ampleur qui n’a jamais été faites. Veut-t’ il nous dire par là qu’il a l’intention d’aller plus loin que Juppé en 1995. L’intention, car comme chacun sait Juppé fut stoppé dans son élan. Il veut réaliser la remise à plat de tous les régimes particuliers. Son crédo c’est que les avantages acquis par les travailleurs de tel ou tel métier branche ou corps de l’état, serait une injustice intolérable à l’égard de ceux qui n’ont pas les mêmes avantages. Soit, pourquoi pas dire les choses ainsi s’il s’agit de faire bénéficier tous les travailleurs du meilleurs régime. Mais ce n’est bien sûr pas l’idée de Macron, sa vision de la justice pour les travailleurs est misérabiliste, c’est l’arasement des régimes particuliers et l’alignement par le bas. Il propose aussi la liquidation du régime par répartition qui est pourtant un des piliers du modèle social Français auquel il dit par ailleurs ne pas vouloir s’attaquer, et son remplacement par un système de retraite par points « un point, un euros » c’est son slogan », ce qui veut dire que les travailleurs mieux payés, pourront acquérir d’avantages de points et donc une meilleure retraite. Mais là nous ne sommes plus dans la justice niveleuse par laquelle il a justifié sa charge contre les régimes particuliers.

    3) La suppression de 120 000 fonctionnaires. Il est gentil Macron, Fillon lui dit moins cinq cent mille, et Juppé disait moins cent mille La vérité c’est que ce chiffrage n’a aucune espèce d’importance. Ce que feraient réellement dans ce domaine les uns et les autres dépend d’un trop grands nombre de facteurs. C’est à la fin du quinquennat de l’élu que l’on chiffrera vraiment le nombre des emplois détruits dans les fonctions publiques. Non, la seule chose qu’il faut retenir c’est que les uns et les autres veulent ouvrir en grand « ce chantier » de la réduction massive du nombre de fonctionnaires. Mais attention, supprimer des emplois de fonctionnaires cela ne veut pas nécessairement dire supprimer autant d’emplois réels. Cela peut vouloir dire surtout supprimer des emplois au statut pour les remplacer par des emplois d’intervenants extérieurs, de sous-traitants, des CDD et des emplois précaires. Ne garder sous statuts que les emplois des grands commis de l’Etat dont il faut s’assurer la fidélité, et en sortir tous les petits emplois techniques ou de « chatouilles ordinateurs » (version réactualisé du gratte-papier). C’est donc surtout, dans un cas comme dans l’autre, d’une attaque massive contre les statuts des fonctions publiques dont il est question ici.

    On le voit, au point de vue des classes laborieuses, le programme de monsieur Macron est une calamité qui n’a rien à envier à celui de monsieur Fillon. Si l’article n’est pas très porteur, le vendeur ne l’est guère d’avantage. Il manque de charisme et de clarté, sa voix est celle d’un orateur de conseil d’administration pas celle d’un tribun, lors du débat des 5 sur TF1 la semaine passée il fut à deux reprises à la limite du « bafouillage » et eut un « blanc » de plusieurs secondes, quand il veut monter d’un ton il doit hurler. Cela s’explique certes, cette voix ne vient pas de son organe propre, c’est celle d’un ventriloque de la City et du Palais Brongniart.

    Alors que reste-t-il ? L’illusion, la machine à tromper, les médias propriétés des banquiers qui tournent à plein régime pour lui servir la soupe, et le réflexe grégaires d’un nombre certain d’électeurs potentiels qui s’agglutinent à la foule du « bateleur » qui a la meilleure place de la foire présidentielle et les plus puissants amplificateurs.« Nous partîmes cinq cents ; mais par un prompt renfort, nous nous vîmes trois mille en arrivant au port, » (Pierre Corneille – « Le Cid »). C’est ainsi que le sent probablement monsieur Macron, porté par l’enflure des flatteurs et des jocrisses et persuadé que « sa valeur n’attend pas le nombre des années ». Mais ceux-là, (Macron et son troupeau de dupes) ne sont pas près d’être rendus à l’estive qui est le havre des moutons ? Avant que d’y atteindre, foin de gagner de nouvelles adhésions, ils risquent de perdre le plus grande partie de leurs effectifs.Le troisième « challenge » est le plus difficile en effet, il faut transformer la promesse en acte d’achat. Et là, à l’heure de vérité, les illusions s’envoleront. Les électeurs se raviseront. Les moutons seuls voteront Macron. Or, sommes toutes, nous le verrons alors, ils ne sont pas si nombreux que ça les moutons parmi les Français.


    Patrick Seignon. « lavoiedessansvoix.fr ». Jeudi 22 mars 2016.
  • bouton partage