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  • MEDOR !

    MEDOR !

    Il est joli mon chien. Oh, ce n’est pas un braque, un labrador ou un setter, non c’est un « bâtard » un « corniaud ». Je ne l’ai pas acheté cher dans un élevage canin, je l’ai ramené pour trois fois rien d’un refuge de la SPA. Pourtant, je l’aimais bien mon chien, il me collait aux talons comme mon double, il me sautait dans les bras quand je rentrais à la maison, il me léchait les mains. J’étais même fier de lui, de son amour, de son attachement, de sa fidélité. Et comme il lui était arrivé quelque fois de grogner en montrant les crocs à des étrangers « pa (très) tibulaires », je croyais aussi qu’il était hardi et courageux, et que je pourrais compter sur lui si j’étais une fois aux prises avec quelques dangers.

    Je suis triste à présent, il m’a déçu, je ne sais même plus si je l’aime, en tout cas pas autant. Sa conduite m’a plus blessé d’ailleurs qu’elle ne m’a déçue, j’ai eue honte pour lui et étant son maitre j’ai étais humilié par lui.

    Un petit vaurien s’était introduit chez moi, armé d’un pistolet, factice ou vrai, à eau ou à grenaille, je ne sais pas. Je lui ai bien demandé : « C’est un jouet ton truc », il m’a répondu « tu veux qu’on essaye », « non ce ne sera pas utile », il en voulait à mon argent. Mon chien s’était posé sur son cul à côté de moi, regardait l’homme avec ses yeux jaunes des mauvais jours et montrait les crocs en grognant méchamment. J’étais sûr à cet instant que mon brave animal allait dévorer l’agresseur. A moins que celui-ci ne tue le chien.

    Mais l’homme, sans cesser de me braquer contourna le chien, lui administra un coup de pied au cul en criant : « Médor à la niche ! ». (Il ne s’appelle pas Médor mon chien !) Je vis l’animal se dresser sur ses pattes tremblantes queue rabattue et oreilles pendantes courir en jappant vers sa niche et s’y terrer. J’ai donné au petit malfrat les 46 euros soixante et douze centimes qui trainaient dans ma réserve de liquide. Il est reparti, je suis sauf, humilié mais sauf.

    Je n’ai pas porté plainte, je ne voulais pas raconter aux gendarmes l’humiliante Histoire de mon chien.

    J’étais allé le chercher à la SPA dimanche 25 novembre le lendemain de la première manifestation de « Gilets-jaunes » ou à peine rendu à 14 heures sur les lieux de la manifestation, je vis un jeune homme à côté de moi s’effondrer, touché à l’oreille par une balle de LBD et fut moi-même un peu après, mais de trop loin pour qu’elle me blesse, atteint par une autre dans le dos. Salaud de Mac…., ais-je pensé alors. Nous prend-il pour des chiens, crois-t-il qu’il va nous renvoyer à la niche à coup de pieds au cul ? Et c’est ce soir-là, rentrant à la maison que j’avais baptisé mon chien « Flashball ».

    Le mal nommé.

    Je me suis tout de même vengé de mon chien. Je ne l’appelle plus « Fashball » mais « Médor ».


    Patrick Seignon. « lavoiedessansvoies.fr ». Vendredi 15 février 2019.
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